Rupture du silence autour de la ménopause

Bien que l’existence de la ménopause soit connue de tous, l’aborder ouvertement n’est pas une mince affaire, et certainement pas au travail. Pourtant, en parler est précisément ce qu’il faut faire quand il est question de sensibilisation et de l’impact possible sur le travail. Le présent article offre un aperçu sur cette phase de transition, l’impact sur le lieu de travail et les mesures possibles pour l’employeur.

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Ménopause au travail : tendances et perceptions

En raison de la hausse de l’âge du départ à la pension et de l’augmentation du taux d’emploi, un nombre croissant de femmes âgées de 45 ans et plus restent au travail. Elles doivent donc faire face à des troubles liés à la ménopause pendant leurs années d’emploi, ce qui peut avoir un impact sur le travail. Néanmoins, les recherches mettent en évidence que les femmes elles-mêmes et l’employeur ont peu de connaissances sur ce sujet souvent relégué à l’arrière-plan. D’une part, les femmes ne sont pas suffisamment sensibilisées aux signes physiques indicateurs de la ménopause. D’autre part, elles ne voient pas d’opportunités ou craignent de formuler face à leur employeur les troubles liés à leur ménopause et leur impact sur le travail. La honte et la peur de la stigmatisation, des stéréotypes et de la discrimination jouent un rôle majeur dans cette crainte. Les employeurs, en revanche, ont du mal à créer un environnement de travail sain pour les employées au cours de cette phase de la vie.

Dr Saujan Bharati, médecin du travail chez Cohezio : « Tout le monde connaît les symptômes classiques tels que les bouffées de chaleur, mais il existe de nombreux autres symptômes que l’on ne connaît pas encore suffisamment. De nombreuses femmes se sentent moins en forme qu’avant, fatiguées et déprimées. Elles attribuent parfois cela à leur travail ou à leur âge, mais elles ne savent pas toujours que cela peut être lié à la ménopause. »

Ann Quaghebeur, médecin du travail chez Cohezio : « La plupart des femmes qui souffrent vraiment de troubles en parleront davantage avec leur médecin traitant qu’avec le médecin du travail. C’est un sujet dont on parle très peu, et encore moins au travail. »

Qu’est-ce que la ménopause ?

La ménopause est une transition répartie en trois étapes consécutives : la périménopause, la ménopause et la postménopause. La périménopause peut survenir dès l’âge de 40 ans, avec d’éventuels symptômes associés. Sa durée (5 à 15 ans) et ses symptômes varient également considérablement d’une personne à l’autre. Il est donc difficile pour les professionnels de la santé de diagnostiquer et d’entamer un traitement adéquat. Les changements hormonaux sont à l’origine d’éventuels symptômes physiques et psychologiques au cours de cette phase de la vie : le niveau d’œstrogènes baisse, ce qui peut provoquer des symptômes tels que des douleurs musculaires et articulaires, des bouffées de chaleur, des sueurs nocturnes et une sécheresse vaginale. Parmi les autres symptômes non spécifiques à la ménopause, qui peuvent être liés à cette phase de la vie, mais sont également similaires aux signes du burn-out, citons les problèmes de sommeil, la fatigue, les maux de tête, les sautes d’humeur et les troubles cognitifs tels que la perte de concentration et les trous de mémoire. De plus, les propriétés protectrices des hormones féminines sont progressivement perdues : le risque de maladie cardiovasculaire et de diabète augmente alors.

Dr Saujan Bharati : « J’essaie d’être attentif aux symptômes tels que la fatigue, les maux de tête ou les fractures. Il s’agit toujours du point de départ pour aborder le sujet de la ménopause. De même, quand j’entends dire que les choses ne vont pas très bien au travail ces derniers temps, on examine ensemble depuis combien de temps cela dure et si on peut éventuellement établir un lien. »

Impact sur le travail

Plus de la moitié des femmes belges en ménopause déclarent subir des conséquences occasionnelles des symptômes de la ménopause au travail. Les bouffées de chaleur peuvent être perçues comme problématiques sur le lieu de travail, car elles ont un impact sur la confiance en soi. Leur imprévisibilité crée des moments gênants lors des réunions et autres activités liées au travail. Les symptômes liés à la ménopause tels que les problèmes de concentration et une humeur dépressive peuvent également exercer un impact négatif sur le travail lui-même et sur les relations sociales au travail : une marge d’erreur plus élevée ainsi qu’une motivation, un engagement, une satisfaction professionnelle, une productivité et une applicabilité en berne. Il existe également un risque accru d’absentéisme, de rotation du personnel et même de retrait complet du marché du travail. 40 % de l’absentéisme chez les femmes entre 45 et 55 ans serait dû à la ménopause.

À l’inverse, le travail a également un impact sur les symptômes de la ménopause. Le stress et une faible autonomie au travail les aggravent. Ils augmentent la pression artérielle et le taux de cholestérol et sont susceptibles de favoriser davantage les symptômes de la ménopause tels que l’altération des fonctions cognitives.

Dr Mathieu Versée, médecin du travail chez Cohezio : « La ménopause est quelque chose qui pèse énormément sur le moral. La résilience diminue. C’est donc un facteur de risque important de burnout, surtout en combinaison avec un travail aux exigences élevées. De plus, quand on ne comprend pas ce qu’il se passe dans son corps, l’impact peut être très important. »

On peut également voir dans la ménopause un temps de réflexion, le moment par excellence pour réfléchir à la place que l’employée envisage pour elle-même au sein de l’entreprise. De quelle manière durable peut-elle apporter une contribution utile jusqu’à l’âge de la retraite ? Souvent, il s’agit d’une période où les relations sociales entre collègues se trouvent renforcées, en particulier en présence d’une culture d’ouverture rendant le dialogue possible.

Actions ciblées de l’employeur

Qu’est-ce qui a une influence positive sur les symptômes de la ménopause ? Pour la femme en question, il s’agira de trouver des mécanismes d’adaptation individuels tels que des ajustements du style de vie. La sensibilisation et le soutien adéquat de la part de l’employeur sont également très importants. Il est donc important que l’employeur prenne des mesures pour répondre au mieux aux symptômes liés à la ménopause.

Culture organisationnelle ouverte

L’idéal est d’instaurer une culture organisationnelle ouverte où la hiérarchie, le département des RH ou la personne de confiance (idéalement une collègue ayant de l’expérience en la matière) sont conscients de l’impact de la ménopause. Ce qui peut faire la différence, c’est une approche compréhensive et empathique, éventuellement agrémentée d’une petite touche d’humour pendant l’entretien destiné à rechercher une solution. Une brève séance de formation pour les parties prenantes peut faciliter cette approche.

Dr Saujan Bharati : « Avoir un entretien avec une personne de confiance durant cette phase peut représenter un véritable soulagement pour beaucoup de femmes. »

Conditions de travail

Les conditions de travail peuvent, si possible, également bénéficier d’une adaptation : l’idéal est de mettre en place des espaces de travail avec régulation de la ventilation et de la température.

Dr Manuel Decoene, médecin du travail chez Cohezio : « Les symptômes de la ménopause s’aggravent en présence de certaines ambiances thermiques. Dans un environnement humide ou chaud, les femmes se sentiront très oppressées et auront tendance à transpirer. Il est important que l’employeur prenne cette situation en compte. »

Conditions de travail

En outre, les conditions de travail des femmes ménopausées peuvent être ajustées en proposant des horaires flexibles ou, dans le cas du travail de nuit, des horaires différents et une augmentation du nombre de congés liés à l’âge.

Dr Luc Gillemon, médecin du travail chez Cohezio : « De nombreuses femmes dorment mal pendant cette période. Il faut envisager de leur proposer des horaires de travail plus flexibles ou différents, surtout pour les femmes qui travaillent la nuit ou en équipes. »

Charge de travail

L’aménagement de la charge de travail, en accordant une attention particulière aux emplois physiquement exigeants, peut également s’inscrire dans un environnement de travail durable offrant une reconnaissance à la ménopause.

Dr Yves Rasquin, médecin du travail chez Cohezio : « Leur horaire de travail doit leur permettre d’avoir des journées moins productives. À mon sens, cela rentre dans une politique générale de gestion des âges : proposer un travail faisable aux travailleurs plus âgés. Les objectifs peuvent être revus légèrement à la baisse, on peut prévoir une plus grande flexibilité ou un accompagnement plus important. »

Autonomie au travail

Une plus grande autonomie au travail est un facteur prédictif améliorant les taux de cholestérol chez les femmes ménopausées.

Formation

Une dernière action potentielle consiste à proposer une formation sur un mode de vie sain et un vieillissement en bonne santé.

Dr Saujan Bharati : « Les employeurs peuvent organiser des séances d’information, dispensées par exemple par un spécialiste de la ménopause, dans le but de mieux reconnaître et de mieux comprendre le phénomène. »

Stéphanie Hollebosch

Conseillère en prévention - Médecin du travail